Recherche

L’inspiration de la recherche-action

Avant d’être un cursus de formation et de production de savoirs (voir DHEPS), la recherche-action est un art du dialogue entre pratiques de terrain et théories, une disposition de l’acteur social – au sens large – lui permettant de transformer des problèmes rencontrés en objet de recherche. La recherche-action nous inspire en cela qu’elle renvoie aux personnes impliquées leur pouvoir et leur responsabilité à examiner, comprendre et expliquer leurs situations en mobilisant méthode et effort d’écriture.

En faisant la part belle à différentes formes d’engagement des acteurs-chercheurs (pratique, professionnel, émotionnel, militant), la recherche-action participe en même temps d’une actualisation de l’idée de recherche. Cette dernière n’est plus désintéressée, neutre, distanciée (l’a-t-elle jamais été ?), elle est affectée, motivée, située parmi des expériences vécues, des systèmes de valeurs et des appréciations subjectives. La recherche-action permet la production de savoirs situés en interrogeant parallèlement l’état actuel des connaissances et la position singulière des chercheurs vis-à-vis des objets d’étude. Sa méthodologie permet selon nous d’accéder à une compréhension plus sensible de nos situations, des manières de faire recherche sans cloisonner raison et affects apparaissent.

Des questionnements qui cherchent leur formulation au sein de l’association

Du fait de nos activités d’accompagnement et de formation, de nos modes de vie, de nos relations amicales, amoureuses ou de voisinage, nous sommes perpétuellement traversés par des questionnements, étonnements, agacements, incompréhensions. Tantôt une discussion sans queue ni tête, tantôt une réunion un peu poussive, tantôt un mail qui ne manque pas de toupet, tantôt un appel à projet aussi flou qu’intriguant. Parfois, ces situations se répètent ou se font échos entre elles, se partagent à plusieurs. Parfois on sent qu’il y a « de la matière », qu’il y a de l’intérêt « à creuser », « à déplier » les situations et aller voir ce qui se cache dans les plis.

C’est ce que nous faisons par exemple lorsque nous nous penchons plus sérieusement sur le phénomène des Tiers-Lieux, interpellés par le nombre croissant de lieux qui s’en proclament, nourris par les discussions déjà en cours au sein du réseau des Crefad, impliqués du fait de notre volonté d’investir avec le Kerfad des espaces mixtes de par les activités et les personnes. De même, nous nous interrogeons de plus en plus sur les enjeux qui entourent le sentiment d’illégitimité. Celui-ci semble a priori être un frein récurrent à la prise de risque, une source de désengagement, mais comment se fabrique-t-il ? Sur quoi est-il fondé ? Peut-il être déplacé, diminué, annulé, et à quelles conditions ?

Recherches collectives et transversalité avec le réseau des Crefad

Puisque nous sommes limités et que notre temps fini, nous ne pouvons pas seuls, ni au sein du Kerfad, explorer toute l’étendue de nos questionnements (ou alors de façon trop superficielle). En gardant vivace nos liens avec le réseau des Crefad, nous nous offrons aussi la possibilité de participer et de profiter, avec plus ou moins de régularité, des réflexions et recherches qui y sont menées. Ainsi nous suivons avec intérêt les écrits qui se partagent sur des thématiques transversales telles que le corps, l’écrit ou l’habitat.

Accéder à des ressources documentaires et à des publications issues de recherches-actions

La recherche-action exige de nourrir et structurer sa pensée afin de la rendre partageable. Pour nourrir sa pensée, procéder aux allers-retours entre théorie et pratique, la Kerfad alimente et met à disposition une modeste bibliothèque composée d’ouvrages de sociologie, de pédagogie, de philosophie, de psychanalyse ou de sciences littéraires.

Cette bibliothèque est complétée par des publications issues de recherches-actions, sources de savoirs situés et de repères méthodologiques pour toute recherche-action. On verra abordés dans ce second volet des thèmes tels que le rôle de l’écrit dans la transmission, les enjeux des outils dans nos manières de penser nos actions et organisations, les désirs de démocratie dans les initiatives coopératives, les espaces tests agricoles ou encore le genre dans la musique actuelle.

L’échange d’articles, d’écrits en construction ou l’écriture à plusieurs mains sont également des pratiques régulières et encouragées au sein du Kerfad. Ainsi nous relayons par exemple les publications Efadine du réseau des Crefad, multipliant ainsi les occasions de mettre en résonnance réflexions et expériences entre acteurs pairs ou avec des chercheurs.

En plus de notre « centre de ressources », nous essayons d’effectuer un travail de médiation de travaux de recherche produites par des acteurs de terrain et d’ouvrages théoriques. Ce travail peut prendre la forme de rencontres – présentations autour d’un ouvrage de recherche-action et de son auteur. Il peut également prendre la forme de lectures collectives et de discussions au moyen de techniques d’arpentage.

Conscient de la distance symbolique qui peut persister entre « penseurs » et « acteurs », nous souhaitons également créer des espaces de rencontre entre acteurs sociaux et auteurs, qu’ils soient chercheurs, essayistes, romanciers ou poètes, afin de remettre un peu de chair autour des idées et théories, faire circuler le sang et battre les cœurs qui s’émeuvent du monde social et de ses sciences.