Pour une éducation qui permet de résister aux habitudes, injustices et inégalités
Le Kerfad est une association d’éducation populaire membre du réseau des Crefad. Elle se reconnait dans les valeurs du manifeste de peuple et culture.
Croiser pratiques sociales et recherche
L’éducation est un artisanat visant la production d’une culture commune nécessaire à la vie en société et en démocratie. Nous disons « production » et non pas « transmission », car une culture commune ne peut se construire qu’à partir de la pluralité des cultures existantes, par leur rencontre et leur confrontation.
Pour accéder à la variété des cultures héritées ou exprimées – qu’il s’agisse de cultures professionnelles, de classe, de territoire ou de communauté – nous nous appuyons sur les pratiques de chacun.e. Nous considérons ainsi comme pratiques sociales toute pratique témoignant d’une manière de faire société et de cultures singulières. Dans notre acception, les pratiques sociales ne sont pas réservées au secteur professionnel dit « du social ».
Comme tout artisanat, l’éducation s’appuie sur des techniques et des méthodes de production. Au Kerfad, nous nous efforçons de restaurer les liens entre pratiques et recherche : nommer et interroger ses propres pratiques, les enrichir de travaux antérieurs, écrire ses pratiques et les mettre en partage, en débat. La recherche constitue un ensemble méthodologique et théorique qu’il nous appartient de mettre au service de la production d’une culture commune, à partir et à destination des pratiques de terrain. C’est un moyen de se regarder faire et de tendre vers une réinvention permanente des pratiques qui tissent notre société.
Méthodologie
Un socle méthodologique du Kerfad est l’entraînement mental. Issu du mouvement d’éducation populaire Peuple et Culture, l’entraînement mental propose de s’exercer à penser, comme l’on s’exerce physiquement. Il permet de développer un point de vue sur les méthodes d’observation de situation, d’identification des problèmes et de leur analyse, ainsi que sur les méthodes d’élaboration de l’action.
Nourri par les sciences humaines depuis soixante ans, l’entraînement mental se destine à toute personne désirant accéder à la complexité du réel, se situer et évoluer dans une situation problématique, une organisation collective ou plus largement dans la société. Il est une invitation à s’orienter perpétuellement dans des contextes changeants pour ne pas subir nos environnements (domestiques, de travail, relationnels, urbains, etc.)
Plus d’infos sur https://entrainementmental.org
Ecrire, et voir la pensée cheminer
Si l’entraînement mental est un premier pilier du dialogue entre pratiques sociales, théories et méthodologie, écrire est le second. Que l’écriture s’inscrive dans un processus collectif d’organisation (compte-rendus de réunions, bilans annuels, orientations politiques ou stratégiques, etc.), dans un processus individuel de réflexion (journal intime, journal de bord), ou dans un processus de recherche-action, elle est selon nous une manière d’oser penser, une manière de prendre connaissance de ce que l’on sait (ou de ce que l’on croit), une forme créative de mise au travail. Ecrire c’est dater et (se) donner la possibilité de (se) relire, ce n’est donc pas figer la pensée ou l’action, c’est au contraire leur permettre d’évoluer, nous permettre d’en constater les évolutions.
Dans nos actions de formation, nos accompagnements, nos ateliers, l’écrit est un moyen de penser de façon autonome et souvent un objet de travail à part entière.
Lire, rencontrer, interroger
Penser et agir ne peut se faire ex-nihilo, nous le faisons à partir de nos expériences passées mais aussi de nos lectures, de nos rencontres. Le Kerfad tente d’enrichir son environnement par la mise à disposition d’écrits (articles, essai, travaux de recherche, roman, poésie), l’installation rituelle de petites librairies, et par l’organisation de rencontres entre acteurs et chercheurs ou entre praticiens de différents secteurs d’activités, de différentes cultures.
Se nourrir de connaissances et de désirs est une démarche active pas toujours si facile. Les freins à nos curiosités sont nombreux : sacralisation de l’écrit et illégitimité ressentie de certains, difficultés à faire les liens entre des parcours de vie et des pratiques apparemment dissemblables, impression de manquer de temps, de devoir privilégier ce qui est tout de suite opérationnel… Le Kerfad agit à ces différents endroits en développant des techniques de réflexion et de lecture conviviales et en fabriquant des espaces de formation en partie préservés de l’urgence quotidienne.
Nommer, problématiser, agir
Nous trouvons la recherche-action inspirante pour persévérer dans nos métiers / pratiques dans la mesure où celle-ci nous aide à traduire les problèmes de terrain en objets de recherche, à transformer les situations bloquées dans l’impasse en escape game.
Pour agir et agir durablement en faveur d’une société plus juste et égalitaire, il nous faut faire l’effort de nommer nos pratiques telles qu’elles sont (et pas seulement telles qu’on voudrait qu’elles soient). Selon les cas et les moments, cela pourra consister à « mettre des grains de sables dans les choses sûres » (douter des évidences), « regarder les cailloux dans nos chaussures » (identifier les différents aspects d’un problème), « se faire tailleur de pierre » (à défaut de faire disparaître un problème, le réduire avec élégance). Et tout cela sans « accuse[r] la pierre d’être gauchiste à cause de sa façon de vivre, résistante et tenace » (Roque Dalton).
Se former tout au long de la vie.

L’éducation ne s’arrête pas à la porte de l’école, elle continue tout au long de la vie au fil de nos expériences, de nos pratiques. Le Kerfad propose des formations à destination de toute personne désireuse de questionner et faire évoluer ses pratiques. Puisque nous n’apprenons jamais seul, nos formations s’appuient sur des dispositifs et des techniques favorisant la coopération. Puisque penser est un acte autonome, nos formations s’appuient sur une culture méthodologique permettant de lutter contre les habitudes et les morales subies.
Formation professionnelle
Une fois les bancs de la formation initiale quittés, une manière de poursuivre sa formation et de l’intégrer à son parcours professionnel. En tant qu’organisme de formation*, le Kerfad propose aux salariés de tous bords et aux associations des temps de formation de 1 à 5 jours sur des thématiques transverses à différents corps de métier et à différentes positions professionnelles : travail en équipe, méthodologie pensée-action, éthique et responsabilité, etc. Si nous privilégions les actions de formation hors des cadres habituels de travail, des interventions « sur-mesure » auprès d’équipes déjà constituées sont également possibles.
*Le Kerfad n’est pas certifié Qualiopi mais fonctionne en partenariat avec des associations certifiées.
Rencontres et formations par les pairs
Que vous soyez un praticien avec un réseau ou une association avec des membres et des partenaires, vous pouvez avoir le projet de rassembler autour d’un événement de formation. Le Kerfad peut alors se positionner en accompagnement ou en soutien de votre démarche. Selon les situations, nous pouvons proposer d’élucider avec vous les enjeux de votre événement, de vous aider à formuler vos questionnements en objets de formation, partager voire mettre en œuvre nos méthodes d’organisation et nos techniques éducatives.
Liens avec l’éducation nationale et l’enseignement supérieur
L’éducation populaire et l’instruction publique se sont toutes deux inspirées de la pensée de Condorcet et encore aujourd’hui, les acteurs de ces deux mondes parallèles défendent des mondes souhaités proches. Entretenir des liens avec l’éducation nationale et l’enseignement supérieur, que ce soit via des associations tierces (ICEM, OCCE) ou par l’intervention dans le parcours de formation des étudiants (lycée professionnel, IUT), est une autre manière pour le Kerfad d’affirmer la nécessité d’une éducation diversifiée et émancipatrice à tous les moments de la vie.
Formation des bénévoles
Des espaces d’apprentissage privilégiés pour se former tout au long de la vie en lien avec ses pratiques sont les espaces d’engagement, notamment bénévoles. Ainsi, le Kerfad propose des formations pour ses bénévoles (administrateurs, animateurs, formateurs) en essayant autant que possible de mutualiser ces espaces afin que des bénévoles d’associations partenaires ou environnantes viennent participer et enrichir ces temps.
Les objets de formation sont, en plus de ceux proposés dans la cadre de la formation professionnelle, l’écriture (autorisation, style, synthèse), la démarche de la recherche-action, les liens entre théories et pratiques (via la pratique de l’arpentage).
L’accompagnement : une méthode de formation in situ ?

Le Kerfad propose des accompagnements pour les associations, collectifs, individus qui souhaitent structurer et/ou faire évoluer leur activité, dans des contextes souvent décourageant, toujours complexes. L’accompagnement est pour nous une action éducative parmi d’autres dont les formes particulières permettent de travailler avec précision les relations entre pensées et pratiques, entre théories et concrets. Apprendre par l’accompagnement c’est apprendre en contexte et faire de l’action un levier pour penser sa situation, la modifier, inventer des manières de faire. Les accompagnements proposés par le Kerfad se font toujours sur demande et en dialogue avec les personnes ou structures demandeuses.
« Chaque fois que quelqu’un est confronté à une expérience, à un projet qui exige, pour aboutir, son engagement à nul autre substituable, un accompagnement peut être une posture adéquate. »
Mireille Cifali Bega, entretien L’accompagnement. Un nouvel horizon pour la formation.
Accompagnements de collectifs ou de structures
Les accompagnements collectifs proposés peuvent viser :
- l’analyse de pratiques. L’enjeu est alors de se regarder faire et évoluer en nommant les pratiques et les méthodes de travail / d’organisation par-delà les évidences et en identifiant les manques, les angles morts, les pistes d’améliorations.
- la réponse à un problème rencontré. L’enjeu est alors de comprendre le problème en dépliant ses différents aspects et en tentant de l’éclairer via une multiplicité de points de vue et d’apports théoriques. Ce type d’accompagnement va jusqu’à l’élaboration d’actions à mettre en œuvre.
- le développement d’une activité. L’enjeu est alors de caractériser le contexte / l’environnement dans lequel l’activité est projetée, d’identifier les freins et les leviers, tout en prenant garde à préserver le sens du projet et l’élan désirant des acteurs.
Certains accompagnements peuvent rentrer dans le cadre du Dispositif Local d’Accompagnement (DLA).
Accompagnements individuels avec l’écrit
Les accompagnements individuels proposés peuvent viser :
- la formulation d’un projet. L’enjeu est alors de faire dialoguer des désirs individuels avec un environnement donné, de trouver les points de jonction, d’organiser l’action dans le temps long.
- l’écriture d’un questionnement, d’une expérience, d’un raisonnement, d’un point de vue situé. L’enjeu est alors de traduire une connaissance intuitive, affective, ou désordonnée dans une langue et une forme permettant son utilisation par d’autres.
- un premier pas vers l’expérimentation. L’enjeu est alors de débloquer l’agir en l’appuyant sur un cadre formel minimal et un principe de droit à l’erreur. L’objectif est alors de vivre l’alternance et la complémentarité de la préparation, de l’action, et de l’évaluation.
Un grande partie du cadre de ces accompagnements réside dans la régularité de l’écriture et la diversité de ses modes (récit de vie, étude de terrain, description de situation, tableaux, schémas…).